Témoignage Camille

En novembre 2022, était organisé le 1er Chantier Coopératif des Travaux Suspendus (voir le récit du chantier) en partenariat avec Les Compagnons Bâtisseurs Rhône-Alpes. Pendant 2 semaines, 30 artisan.es de Cabestan se sont relayés pour aider Camille à isoler et améliorer l’état de son logement.

Mère seule aux revenus très modestes, Camille vivait avec ses 2 enfants dans les courants d’air et le froid. Le Chantier Coopératif a permis à Camille de réaliser des travaux indispensables mais non aidés par les dispositifs publics : reprise du solivage, remplacement du planché, cloisonnement de la salle de bain, ouverture dans un mur…

Du rêve à la galère

« Je me rappelle du jour où j'ai posé pour la première fois les yeux sur cette maison. Elle était dans son jus, mais avait un quelque chose en elle m'a captivé. Une sorte de charme brut, peut-être. Je me suis promené devant, émerveillé, me disant intérieurement "waouh, c'est beau". C'est ainsi que l'aventure a commencé.

Les travaux étaient inévitables. La maison avait besoin d'un sérieux coup de neuf. J'ai établi un budget de 50 000 euros pour les rénovations, un montant que je pensais raisonnable. Mais comme on dit, rien ne se passe jamais comme prévu. Les artisans, bien que compétents, semblaient naviguer dans leur propre monde. Les retards, les imprévus, les erreurs... tout cela est devenu une routine frustrante.

Lorsque nous avons enfin intégré la maison, les difficultés n'ont pas disparu. Les conditions thermiques étaient mauvaises. Le froid s'infiltrait partout, même avec nos radiateurs électriques. Les pulls et les peignoirs sont devenus nos alliés quotidiens, et chauffer les peignoirs des enfants à côté du radiateur est rapidement devenu une habitude matinale.

Mais au-delà du froid, il y avait d'autres problèmes. La salle de bain ouverte sur la cuisine et le salon n'était pas idéale, surtout pour mes enfants qui se sentaient mal à l'aise d'inviter leurs amis. Cela ne faisait que renforcer le sentiment de différence parmi leurs camarades.

Cinq ans ont passé dans ces conditions. Cinq ans à jongler avec les contraintes financières, à attendre que le délai nécessaire pour solliciter des aides passe. Cinq ans à rêver de terminer les travaux pour rendre cette maison enfin habitable dans son intégralité.”

Se relancer grâce à “coup de pouce”

“Parfois, on a besoin d'un coup de pouce, d'une main tendue. En effet, même si on est entouré d'amis et de famille, on se sent parfois seule. C'est pourquoi j'ai attendu avec impatience le moment où je pourrais enfin demander de l'aide, où je pourrais avoir quelqu'un pour m'épauler dans cette aventure.

J'ai eu la chance de rencontrer Stéphane, accompagnateur technique des Compagnons Bâtisseurs, une personne incroyablement humaine. Il a immédiatement pris en compte ma situation et m'a proposé d’organiser un chantier en auto-réhabilitation accompagné (ARA) pour terminer le plafond de l’étage. Ainsi, en janvier 2022, avec l'aide de Stéphane, de Bob des Compagnons Bâtisseurs, et de quelques amis, nous avons entrepris la rénovation du plafond.

Ce fut une expérience incroyable qui a permis de me relancer. Il n'est pas toujours facile de demander à ses amis de sacrifier leur temps libre pour travailler sur un projet comme celui-ci, mais ils ont répondu présents. Leur soutien a été inestimable.

En discutant avec Stéphane, il est devenu évident que le prochain défi serait de refaire le plancher de la maison, une étape cruciale pour améliorer son efficacité énergétique. En parallèle, j'ai également entamé le processus pour obtenir une aide de l'ANAH pour remplacer les menuiseries, chose que je ne pouvais pas faite avant compte-tenu du fait qu’il fallait attendre 5 ans avant de solliciter toute nouvelle aide. En effet j’avais bénéficié en 2017 d’un prêt à taux zéro pour entamer la rénovation de ma maison.

Stéphane m'a mis en contact avec une charpentière, Marine, avec qui nous avons élaboré un plan de chantier en auto-réhabilitation accompagnée. Cette approche collaborative et solidaire m'a semblé être exactement ce dont j'avais besoin. Mais c'est lorsque Stéphane a évoqué le fonds solidaire "Travaux Suspendus" de Cabestan que j'ai commencé à comprendre l'ampleur de l'aide que je recevrais.

Vivre le Chantier Coopératif

À deux semaines du début du chantier coopératif, j’avais un mélange d'excitation et d'appréhension. Mais cela m'a également donné l'impulsion nécessaire pour terminer certains travaux préparatoires à la maison. Les journées précédant le chantier ont été intenses, entre la préparation du site et l'organisation de notre vie quotidienne. Mais savoir que j'avais le soutien de Stéphane et de l'équipe de Cabestan m'a apporté une certaine tranquillité d'esprit.

Le chantier lui-même a été une expérience intense mais gratifiante. Je me suis retrouvé à effectuer toutes sortes de tâches, de l'électricité à la plomberie, en passant par la coordination des travaux avec l'équipe. Chaque journée était remplie de défis, mais aussi d'une incroyable énergie collective.

Il y a eu des moments de doute, bien sûr, mais dans l'ensemble, j'avais confiance en l'équipe et en moi-même. Nous étions tous là pour une raison commune, et cela se ressentait dans chaque geste et chaque échange.

Au final, ces deux semaines ont été une expérience à la fois épuisante et enrichissante. Je suis reconnaissant envers Stéphane, Marine et toute l'équipe de Cabestan pour leur soutien et leur dévouement. Cela a été bien plus qu'une simple rénovation de maison ; c'était une véritable aventure humaine.

Pour moi, avoir toutes ces personnes donnant de leur temps et de leur énergie était très émouvant. Après le chantier, il y avait encore beaucoup à faire, notamment installer le poêle, réaménager les pièces et rendre la maison habitable. J'étais sur le pont, jonglant entre la reprise du travail et les travaux à domicile.

Le premier jour après le chantier, mes enfants et moi avons immédiatement ressenti un changement. La première chose qu'ils ont faite, sans même se concerter, c'était passer l'aspirateur. Enfin, nous avions un vrai sol et la perspective de pouvoir le laver était un luxe pour nous. Avant, avec les moquettes, tout bougeait quand on marchait. Maintenant, nous ressentons un confort réel, tant au niveau thermique que physique.

La nouvelle porte et les fenêtres ajoutées ont amélioré l'isolation et la circulation de l'air. Nous attendons avec impatience cet hiver pour profiter pleinement de ces changements.

La prochaine étape est l’installation d’une double VMC et d'un nouveau poêle plus performant. Malgré quelques retards dans les travaux, je reste optimiste quant à l'amélioration continue de notre maison.

Mon prochain défi est de consacrer six mois à terminer les travaux restants. Une fois cela fait, j'espère enfin pouvoir reprendre une vie plus normale, profiter de balades et retrouver une vie sociale active après ces dix années passées principalement entre les murs de ma maison en rénovation. »

Sortir de la précarité énergétique